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En
1920, au moment du Congrès de Tours, Gustave Giraudet est déjà
une figure connue du Parti Socialiste qui s'est constitué en 1905. Professeur de
philosophie au Collège de Romorantin, il a été l'un des 4 candidats "socialistes
unifiés" aux élections législatives de 1919 (les 3 autres étaient un typographe,
Gaston Tessier, et deux viticulteurs, Louis Besnard-Ferron de Villiers et
Sylvain Chevet de Saint-Romain). Avec 14,4 % des voix dans le département et,
plus encore, 29 % à Blois, la liste, bien qu'arrivée en dernière position, a
réalisé une vraie percée de ce qui était encore considéré comme
l'extrême-gauche, même après la participation des socialistes au gouvernement
d'Union sacrée. Pour apprécier la valeur du résultat, il faut rappeler que le
candidat "socialiste unifié", Berthier, avait recueilli 3,4 % des voix dans la
1ère circonscription du département, et 6,5 à Blois, en avril 1914, dernières
élections avant la guerre.
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La grande affaire en 1920
pour les socialistes reste la question de l'adhésion à la IIIème Internationale:
Giraudet fait d'emblée partie du groupe partisan du bolchevisme qui, minoritaire
dans le Loir-et-Cher au début de l'année, au Congrès de Strasbourg, devient
majoritaire au Congrès de Tours, en décembre (13 mandats sur les 21 dont dispose
le département). Les partisans de Longuet ("reconstruction") et de Blum (refus
de l'adhésion), emmenés par Besnard-Ferron (Villiers/Loir), Bled (Montrichard)
ou Reibel (Selles/Cher) sont écrasés, d'autant que Sylvain Chevet, maire de
Saint-Romain et autre figure du socialisme départemental, s'est rallié aux
partisans de la IIIème Internationale. Sur les débats qui agitent la mouvance
socialiste jusqu'au Congrès de Tours, on lira avec profit "Le Progrès de
Loir-et-Cher" (ADLC-190 PER), l'hebdomadaire socialiste d'alors, exploité par
Denise Ferrisse pour son mémoire de maîtrise, soutenu en 1971 et déposé aux
Archives Départementales de Loir-et-Cher (GF 492). Pour
Gustave Giraudet, 1921, l'an I du communisme français, est une année
faste puisque les électeurs de Romorantin l'envoient au Conseil Municipal. C'est
l'occasion pour lui de les remercier et d'exposer, en affiche, ses conceptions
politiques, les "valeurs", dirait-on aujourd'hui, qui l'animent. Derrière
l'exercice de lyrisme imposé que constitue la rédaction d'une affiche de
remerciement, on lit aisément ce qui inspire le professeur, nourri à l'écriture
sainte (il a été séminariste) au moins autant qu'aux Lumières et qu'à
l'éloquence jauréssienne: au-delà d'un affrontement pour le Pouvoir (majuscule
obligatoire), le combat politique est une exigence morale qui mobilise "des
armes pures", des "esprits généreux", la loyauté de la "parole
donnée", et qui est autant une affaire de "coeur", y compris pour
des "concurrents honorables", que de raison.
On lit aussi la mystique de l'unité, le
désir de se fondre dans une communauté chaleureuse et la certitude d'un
lendemain nouveau, un écho en somme à l'espoir de cette génération sortie
vivante et meurtrie des tranchées. Tout ce que sera le militantisme communiste,
à la fois généreux, fusionnel et dogmatique, est déjà présent dans la
parole enflammée du nouvel "élu": une vision enchantée du monde, où les coeurs
des Maires entendent les voix unanimes "affranchies des égoïsmes
"...
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L'opuscule (
format 13X10 cm) "CE QUE NOUS PENSONS, CE QUE NOUS
VOULONS", dans une veine moins lyrique, est destiné à la conquête
"raisonnée" de la "masse". Mais derrière la raison affichée,
la passion n'est jamais très loin, qui fustige le Capitalisme, ses forces d'Etat
(fonctionnaires, militaires, policiers, magistrats, clergé) et ses
"valets" réformistes et autres "politiciens arrivistes".
Gustave Giraudet et un F.G. (Fernand
Grenouillon, ancien militant pacifiste et anarchiste) y exposent leurs
certitudes sur un monde libéré du besoin, dans lequel le pauvre et le riche
trouveront une égale satisfaction: le premier en échappant à l'indigence, le
second au souci de conserver sa richesse. Comment atteindre cet état d'équilibre
parfait où "rivalité et concurrence" auront disparu, au profit d'une
société sans conflits dans laquelle chacun produira selon ses forces et
consommera selon ses besoins ?
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La
rigueur doctrinale peut s'adapter aux circonstances locales... Notons la place
éminente que prend Lénine dans l'imaginaire militant: le personnage
devient (ici, en décembre 1921 ) suffisamment incontestable pour qu'un délégué
au Congrès Fédéral (Gustave Giraudet lui-même) utilise son autorité au profit
d'un opportunisme électoral un rien
politicien...
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